L’euthanasie signifie la douce mort. Cette douce mort désigne le fait, pour un médecin, d’abréger les souffrances d’un malade incurable en lui donnant la mort. Beaucoup de personnes voient dans l’euthanasie un moyen de soulager la souffrance de certaines fins de vie. Avant de leur donner raison, il importe de voir ce qu’il y a derrière et ce qui risque d’advenir après si celle-ci est légalisée.
I. LA VIOLENCE
En premier lieu, il importe de rappeler que l’euthanasie ne consiste pas dans le fait simple d’abréger les souffrances d’un malade, mais dans le fait complexe de donner la mort pour abréger les souffrances d’un malade. La nuance est importante. Dans un cas, on a affaire à un geste humanitaire. Dans un autre cas, on est en face d’une violence inouïe. Tant il est vrai qu’il est désastreux de devoir tuer quelqu’un pour abréger ses souffrances.
Le passé témoigne de ce désastre. C’est sur les champs de bataille, quand on ne pouvait pas faire autrement, que l’on achevait les blessés. Par ailleurs, c’est le nazisme qui a formulé le projet d’euthanasier les vieux et les déficients mentaux, ceux-ci étant jugés inutiles et trop coûteux pour la société. La débâcle des champs de bataille. Le nazisme. La mémoire de l’euthanasie est chargée. Si la mémoire est lourde, le présent l’est tout autant. Le meurtre est interdit par la loi. La peine de mort a été abolie. Qu’on le veuille ou non, avec l’euthanasie, on a affaire au retour de l’un et de l’autre.
La débâcle des champs de bataille. Le nazisme. La mémoire de l’euthanasie est chargée. Si la mémoire est lourde, le présent l’est tout autant. Le meurtre est interdit par la loi. La peine de mort a été abolie.
II. LA PRECIPITATION
S’agissant du malade, il semble qu’il y ait une confusion. Une chose est de désirer ne pas souffrir, une autre de mourir. Ce n’est pas parce que l’on désire ne pas souffrir que l’on désire mourir. Attention donc de ne pas prendre le désir de ne pas souffrir pour un désir de mort ! Attention au fait de donner la mort sous prétexte d’éviter la souffrance ! Attention au fait de faire croire qu’avec la mort, les souffrances vont cesser ! Quand on fait de la mort la médecine suprême, on se précipite et l’on attise les désirs de mort.
Aujourd’hui, la médecine en Occident est devenue très performante. Si performante qu’elle est d’un certain point de vue responsable de la question de l’euthanasie, celle-ci ramenant des personnes à la vie mais dans un triste état ou les faisant vivre artificiellement. La loi Léonetti de 2005 se propose d’autoriser la médecine à cesser les soins et selon l’heureuse expression de Marie de Hennezel de « permettre la mort » au lieu de « donner la mort ». L’expérience montre que cette loi qui est bonne est mal expliquée et mal appliquée. Si on l’appliquait, 95% des problèmes d’euthanasie seraient résolus. D’où cette question : pourquoi n’applique-t-on pas la loi Léonetti ? Quantité de témoignages montrent que, quand il y a dialogue entre médecin, malade et famille, quand il y a un vrai accompagnement, quand en outre la fin de vie se déroule dans un contexte spirituel, les malades partent paisiblement sans qu’il soit besoin de leur donner la mort.
Autre question : pourquoi ne développe-t-on pas une culture de l’accompagnement aux mourants en s’appuyant sur le dialogue et la spiritualité ? Plutôt que de penser à donner la mort, ne ferait-on pas mieux d’aider la médecine moderne à acquérir le sens de ses propres limites et la société contemporaine à retrouver un rapport à la mort ?