
Billet d’humeur et d’humour, à humer
Soit les mots ne veulent plus rien dire soit on nous prend pour des imbéciles… Le professeur Jean Costentin, président du Centre national de prévention, d’études et de recherches sur les toxicomanies (CNPERT) réagit à la saisie de 7 tonnes de Cannabis à Paris le 18 octobre dernier
Samedi 18 octobre 2015, faisant la une des actualités radio et télévisées, on apprenait qu’une prise de sept tonnes et quelques kilos de résine de cannabis (shit, haschich) venait d’être réalisée à Paris (dans le XVIème arrondt.).
L’importance était telle que le président de la république, lui-même, s’est rendu sur les lieux pour s’exprimer et déclarer qu’il venait « d’être porté un coup fatal au trafic de cannabis », pas moins.
On apprenait ensuite : que cette prise avait été fortuite, la police ayant été alertée par un riverain, troublé par l’animation qui régnait à l’entour de trois camionnettes en stationnement ; et que, de plus, aucun des trafiquants n’avait été arrêté…
Sous l’inspiration de ce que certains appellent mon esprit critique et d’autres mon esprit de critique, j’aimerais formuler quelques réflexions. Si 7 tonnes de cannabis constituent une très belle prise, elles représentent moins de 10% de ce qui circule en France chaque année. Cela est de nature à raréfier, mais en tous cas pas à tarir, l’approvisionnement des cannabinophiles de la région parisienne, pendant une durée insuffisante pour assurer leur sevrage. Le réseau n’ayant pas été neutralisé, il doit déjà se réapprovisionner, pour pallier les ruptures de stock, tandis que d’autres réseaux parallèles ne vont tarder à faire des nocturnes et ouvertures le dimanche… Bref, hélas, rien de « fatal » dans tout cela.
Simple hasard du calendrier, sans doute, cette forte annonce présidentielle survient deux jours après que le premier ministre de la République française, ait signé un décret qui, noyant l’usage du cannabis et autres stupéfiants parmi diverses autres infractions, fait que leur détention et/ou leur consommation, au lieu d’un renvoi vers un tribunal correctionnel, substitue une nouvelle procédure. Elle permet de sanctionner immédiatement l’infraction par une simple amende, qui ne figurera pas sur le casier judiciaire. Il s’agit donc d’une banalisation supplémentaire, par l’État, la justice et la police, du cannabis et des autres stupéfiants. Le procès-verbal, dont on peut craindre qu’il soit alors succinct, risque de ne plus aider beaucoup la police des stupéfiants à remonter les filières. Cette nouvelle disposition est présentée, assortie de diverses considérations, à la limite de l’intelligibilité pour la plupart d’entre nous, non familiers de la chose judiciaire. Mais, en clair, il en ressort que c’est un pas de plus vers la légalisation des stupéfiants. Ce qu’on ne peut faire avaler d’un seul trait, nous est débité en rondelles.
Comme l’exprimait un ami, « avec le Catalan, la « cata » lente des drogues s’accélère ».