Joris-Karl Huysmans, un auteur à (re)découvrir

Joris Karl Huysmans

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Trop souvent nous nous désolons du spectacle qui s’étale sous nos yeux consternés, trop souvent notre cœur s’attriste des nuages qui ternissent l’horizon de notre beau pays et noircissent notre humeur. Trop souvent nous cherchons par tous les moyens un exutoire, une once de sérénité, sans parvenir à la quiétude tant espérée.

Pourtant, nos Anciens savaient trouver la sagesse en puisant au fond d’eux-mêmes, par la parole qu’ils se transmettaient au fil des âges, puis au fil des plumes et calames. Le détachement du superflu par cet héritage. Peut-être alors pouvons-nous non pas philosopher à l’ombre de vieux oliviers, au gré des portiques antiques, mais tout simplement retrouver la simplicité d’une parole silencieuse que nous offre la littérature. Ces milliers de pages nous déposent sur le papier et emmènent notre esprit là où le mal ne semble pas exister.

Certes, la rentrée littéraire engendre bien du tumulte et son tourbillon sent davantage la vanité, une prétention enfin satisfaite à laquelle aspirent tous ces auteurs. Le dernier Nothomb, le futur Goncourt, le roman écolo, la profession de foi politisée d’un prochain candidat… La liste est longue, comme tant de listes, et avale quelque peu notre besoin de dénicher enfin LE livre convoité, l’auteur encore naïf, serein, mais si sincère. On pourra alors redécouvrir plutôt quelques anciens, laisser le temps faire son œuvre pour la rentrée littéraire, et dépoussiérer nos étagères.

Joris Karl Huysmans

Parmi les grands de la littérature, s’il m’était permis d’avancer un nom puisé dans mon vivier personnel, j’oserais vous conseiller Joris-Karl Huysmans. D’un abord plutôt abrupt, le style ample, soucieux de la tournure juste, et de fait parfois la plus longue, aborde les aspects les plus délicats, les plus reculés, les plus spirituels, de ce majestueux XIX° siècle. L’auteur, Charles Marie Georges Huysmans, né au beau milieu d’une période agitée, en 1848, n’a pu que se nourrir des affres de son temps, jusqu’à la souffrance, d’ailleurs. Naturaliste, dandy, décadent, catholique torturé, il est tout à la fois. En esthète, il nous a livré A rebours, et à l’image de  des Esseintes, nous pourrons enfermer notre pessimisme ambiant dans sa, ou notre, Thébaïde, et passer en revue le beau, le bien, le mal. Il faut absolument se plonger avec délices dans la bibliothèque de des Esseintes, de Pétrone à Barbey d’Aurevilly, en passant par les auteurs chrétiens et Baudelaire. Ce bréviaire de la décadence dévoile aussi un personnage critique d’art, dont la névrose alimente les réflexions sur la peinture, la musique, et même l’art floral. Le programme de ce roman, où pourtant il ne se passe rien, incite au calme, à faire en soi le silence et à méditer au fil des lignes. En âme torturée, Huysmans se cherche aussi, dialogue avec son âme, et nous a offert Là-bas, La cathédrale et L’oblat, marqués par ses retraites spirituelles, ses questionnements, ses souffrances. A ses côtés, nous cheminons alors sur la route de notre vie et prenons conscience, curieusement, que ses interrogations ne sont pas si éloignées des nôtres.

Ainsi, si la lecture est un refuge, elle nous permet surtout de nous retrouver avec nous-même, non pas dans un univers  d’égoïsme, mais dans le partage avec ceux qui nous ont précédés et ceux auxquels nous nous confierons alors.

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Grégoire Renaud

Author: Grégoire Renaud

Ingénieur de formation, Grégoire Renaud s'est investi ces dernières années dans le monde associatif. Président et fondateur du site Cyrano.net, il est passionné par les voyages, la littérature, l'histoire et la poésie.