Le Pacte du Mayflower

Le Pacte du Mayflower

Les passagers du Mayflower, fleur de Mai, auraient presque pu chanter la fameuse chanson d’Hugues Aufray, Santiano. C’est à bord de ce quatre mâts de 90 pieds et 180 tonneaux que 102 colons firent la route de Plymouth, ville portuaire du Sud-Ouest de l’Angleterre, à Provincetown, qui sera fondée dans l’état de Massachussets en Nouvelle-Angleterre, aux Etats-Unis.

Le 21 novembre 1620, ces colons anglais s’apprêtent à débarquer sur un continent nouveau et inconnu après avoir signé le Mayflower compact. Ce pacte rédigé par les Pères pèlerins définit les lois qui régiront la future colonie. Considéré comme l’acte de naissance de la démocratie américaine par l’historiographie populaire, ce traité est pourtant une mesure d’urgence nécessitée par une situation de crise.

Considéré comme l’acte de naissance de la démocratie américaine par l’historiographie populaire, ce traité est pourtant une mesure d’urgence nécessitée par une situation de crise.

Parti de Southampton le 15 août, après de multiples déboires dont l’abandon de son escorte, le Speedwell, modeste vaisseau de six tonneaux, en escale à Plymouth le Mayflower profite d’un vent favorable pour mettre les voiles vers les Etats-Unis le 6 septembre 1620. Commandé par Christopher Jones, le navire transporte à son bord une congrégation de 35 britanniques protestants qui a initié cet audacieux projet. Cette secte protestante avait fui les persécutions religieuses en Angleterre et s’était installée à Amsterdam puis à Leyde, aux Provinces-Unies. Elle y menait une existence à l’écart de la société lorsque la menace d’une potentielle guerre entre l’Espagne et la Hollande la convainc de rechercher des contrées plus accueillantes. Ses membres projettent donc de fonder une colonie en Amérique afin d’y recréer un village britannique. C’est une entreprise risquée : depuis le début de l’expansion anglaise aux Etats-Unis, en 1584, seule Jamestown, la colonie implantée en Virginie, est un -relatif- succès.

Le navire transporte à son bord une congrégation de 35 britanniques protestants qui a initié cet audacieux projet.

C’est dans celle-ci que ces pèlerins obtiennent l’autorisation de s’installer, grâce à l’octroi d’une patente. Dans ce périple, ils sont accompagnés par des hommes envoyés par la London Virginia company, compagnie d’investisseurs qui finance le voyage. Celui-ci dure un peu plus de deux mois durant lesquels le Mayflower essuie de gros grains. Ce serait une de ces tempêtes et la présence de hautfonds qui les auraient fait dévier de leur trajectoire officielle. Mais pour certains historiens, les pèlerins eux-mêmes auraient demandé au capitaine de les emmener en Nouvelle-Angleterre. Ils étaient en effet en négociation pour obtenir une patente les autorisant à s’y établir, par l’entremise de Robert Cushman, leur agent resté à Londres.

Ordre ou aléa météorologique ? Toujours est-il que lorsque l’équipage aperçoit la terre, le 19 novembre 1620, le bateau ne s’approche pas des côtes de Virginie mais de Cape Cod, bien plus au Nord, au large de Boston. Le territoire se trouve en dehors des limites autorisées par leur patente et c’est cette situation irrégulière qui provoque, selon William Bradford, pasteur de la communauté, une mutinerie de dix-huit passagers. Partis sous le statut de serfs engagés, ceux-ci décrètent que l’établissement de la colonie dans un territoire autre que la Virginie rend leur servage caduc.

Ce premier désaccord qui éclate avant même leur débarquement sur la terre ferme fait réaliser aux Pères pèlerins l’importance de maintenir une cohésion de groupe nécessaire à la survie de la colonie. Ils décident donc de rédiger un code de bonne conduite pour l’administration de la colonie, afin d’éviter dérives et mésententes. Ce court texte qui réaffirme leur allégeance au roi d’Angleterre instaure un cadre légal minimal et s’inscrit dans le discours politique de l’époque. Ses signataires, 41 passagers masculins dont 18 membres de la congrégation, s’engagent à obéir aux règles de la colonie. Furent donc exclus femmes, enfants, membres de l’équipage et certains serviteurs. Le Pacte est signé le 11 novembre du calendrier julien qui correspondait à l’époque au 21 novembre du calendrier Grégorien ordinairement utilisé. Prôné comme un exemple de démocratie majoritaire, l’égalitarisme du Mayflower Compact tient ainsi plus de la nécessité d’apaiser les mutins que d’instaurer un véritable système démocratique.

Ce pacte leur permet d’assurer la bonne marche de la colonie de New Plymouth, qu’ils fondent officiellement un mois après sa signature. Mais la survie de la communauté sera essentiellement due à l’aide que leur apportera la tribu indienne des Wampanoags. Pour fêter leur première récolte, en automne 1621, les survivants font trois jours d’action de grâce durant lesquels ils convient une partie de la tribu indienne à un repas, afin de les remercier pour leur aide. Thanksgiving est né.

 

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Anne-Laure Debaecker

Diplômée de l'université Paris-Dauphine, Anne-Laure Debaecker est journaliste et collabore en particulier au Figaro et à Cyrano.